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- 04 - Le passé d'un père

  • bleuts
  • 1 déc. 2024
  • 14 min de lecture

Dernière mise à jour : 10 déc. 2024

Partie 1 - Retour à Morthebois


Öta avait pris la route. Il se rendait au domaine de son père, accompagné d’Élan. Il espérait qu'il pourrait lui fournir des explications à propos de l'étrange mal dont il était victime. Après tout, peut-être était-ce génétique ?


Il n'avait pas d'autre choix que de lui poser la question, Élan et lui n'ayant aucune autre piste.



Durant le voyage, les feuilles qui poussaient sur Öta s'étaient multipliées. Ce n'était plus seulement son bras gauche qui était touché, mais également son bras droit et ses cornes.


Pourtant, Öta n'avait plus usé de la magie depuis. Élan voyait ça comme une preuve  supplémentaire que ce n'était pas lié à une utilisation excessive de la magie. C'était plutôt comme si découvrir que ses pouvoirs avaient débloqué quelque chose d'enfoui en lui.


Élan, qui n'en manquait pas une, en profita pour affubler Öta de toute sorte de surnoms. Son favori était « ma p'tite fougère ».



Malheureusement, en arrivant chez lui Öta comprit que quelque chose n'allait pas. Son père ne vint pas à sa rencontre, contrairement à ses habitudes, lui qui était toujours le premier dehors à accueillir les visiteurs.


Les visages des serviteurs étaient fermés, certains lui lançaient des regards lourds. Ça murmurait sur son passage. Que se passait-il ? Öta avait un mauvais pressentiment.



Le mauvais pressentiment d’Öta s'avéra malheureusement juste. Son père avait tenté de mettre fin à ses jours. C'est Elliot, son serviteur le plus proche, qui l'avait trouvé et sauvé à temps.


Depuis ce triste événement, l'homme s'était muré dans le silence. Il ne mangeait plus beaucoup et ne parlait à personne. Elliot restait près de lui et le surveillait attentivement, de peur qui ne tente de nouveau de faire une bêtise, mais les seuls mots qu'il prononçait étaient : « Avez-vous des nouvelles de mon fils ? »


En voyant l'état de son père, la culpabilité serra le cœur d’Öta. À ses yeux, Ëten était une personne que les problèmes ne pouvaient pas atteindre. Il l'avait toujours vu ainsi, n'imaginant pas qu'il pouvait souffrir lui aussi. Mais il restait un homme avec des sentiments, des regrets et le besoin d'être entouré de sa famille.



Öta avait honte de son comportement.


Il ne lui avait envoyé aucune lettre depuis des mois, contrairement à ce qu'ils avaient décidé ensemble. Son père n'avait eu aucune nouvelle de lui. L'inquiétude avait dû le ronger.


Öta n'avait pas eu que des mots tendres à son égard. Avant de partir, une grosse dispute avait éclaté entre eux. Il avait entre autres insinué que son père était responsable de ce qu'avait vécu David et que jamais il ne lui pardonnerait. Ils n'en avaient plus reparlé après ça, mais Öta ne s'était jamais excusé.


Il regrettait tant ces mots qui avaient dépassé sa pensée...




Öta culpabilisait et ne supportait pas de voir son père dans cet état.


Jamais il ne pourrait se pardonner, si seulement il avait été plus attentif, moins distant avec lui... Mais le mal était fait. Aujourd'hui Ëten était très faible. S'être pendu lui avait laissé de nombreuses séquelles.


Son fils n'avait plus l'intention de l'abandonner. Les séquelles étaient lourdes, il était faible et avait peu de chance d'être de nouveau apte un jour à gérer le domaine. Il ne serait jamais plus le même.


Élan se pencha sur la question, mais il ne trouva pas plus de solutions que les autres médecins qui étaient passés avant lui. Même si Elliot l'avait sauvé à temps, Ëten s'était pendu. Il était impossible pour lui d'en ressortir indemne.


C'était déjà un miracle qu'il ait survécu.


Mais même avec tout ça, Öta n'avait pas oublié la raison de sa venue. Les feuilles qui continuaient de pousser sur son corps ne lui permettaient pas le luxe d'attendre que son père aille mieux.


Il tenta plusieurs fois de lui poser la question, de lui montrer ses bras et ses cornes, mais l'homme se murait dans le silence. Il se cachait derrière sa santé, argumentant que parler était difficile, qu'il n'en savait rien, ou changeant même de sujet inopinément.


C'était étrange. Ëten ne semblait pas plus inquiet que ça par ce qui arrivait. Il était évident qu'il en savait bien plus qu'il ne voulait le montrer. Plus le temps passait et plus ses réactions confortaient Öta sur la piste d'un mal qui se transmettait dans le sang.



Avec la convalescence d’Ëten, Öta reprit immédiatement les rênes du domaine. Il n'était pas question de fuir ses responsabilités. Il passa les jours suivant le nez dans les documents. Mais il se rendait compte qu'il ne serait pas capable de tout gérer seul éternellement.


De ce fait, il décida de contacter son oncle. L'homme était le frère aîné d’Ëten et vivait dans leur pays d'origine : l'Est. Öta l'avait rencontré à plusieurs reprises dans son enfance, quand il venait rendre visite à son père. Il se souvenait que les deux hommes étaient très proches.


Il espérait que revoir son frère redonnerait le sourire à Ëten. Et qu'il pourrait l'épauler. Et Öta misait beaucoup sur la venue de son oncle. Peut-être l'homme pourrait-il lui en apprendre plus sur le passé de son père ? Et sur ces feuilles qui ne cessaient de pousser ?



Élan quant à lui, resta aux côtés d’Öta. Il appréciait beaucoup le jeune homme et tenait à lui servir de soutien moral. Il faut dire qu'il en avait bien besoin avec tous ces événements.


Mais plus que ça, son cas le passionnait ! Il l'examinait chaque jour avec attention, prenant des notes et tentant de comprendre comment évoluait ce mal. Et il devait bien l'avouer... dormir dans des draps doux et manger à l'œil, c'était tout de même le pied !



Partie 2 - Le passé d'un père.


« J'ai une bonne nouvelle ! Oncle Üter va venir ! » s'exclama Öta.


Öta avait envoyé une lettre à son oncle, lui expliquant les derniers événements et lui demandant de venir au plus vite. Il n'en avait pas parlé à son père, par peur de le décevoir en lui annonçant un refus, si bien qu'en recevant enfin la réponse, qui était positive, Öta se fit une joie de partager la nouvelle avec son père.


Les yeux d’Ëten s'éclairèrent et un sourire illumina son visage.



Öta fit la route jusqu'au port afin d'accueillir son oncle Üter. Après avoir longuement discuté avec Élan, ils avaient décidé de ne pas cacher les feuilles qui poussaient sur son visage et ses cornes.


En effet, les habitants du Nord ne connaissaient que la Magie blanche. Et celle-ci ne provoquait pas cet effet sur ses mages.


Ils n'avaient donc aucune raison de soupçonner quoi que ce soit. Öta avait peu de chance d'être dénoncé. Après tout, sa race était connue pour son physique... différent. Les attributs animaux des Etris attiraient toujours le regard. Les cornes d’Öta ne passaient jamais inaperçues.


Il ne s'inquiétait donc pas beaucoup. Quand on lui posait la question, il répondait qu'il s'agissait d'une maladie héréditaire typique de l'Est.


Après tout, il n'était peut-être pas si loin de la vérité ?



Revoir son oncle rendit Öta heureux. Il avait toujours apprécié l'homme, gardant de très bons souvenirs de lui. Lorsqu'il venait leur rendre visite, il était toujours accompagné de ses enfants. Öta aimait bien jouer avec ses cousins, qui lui manquaient parfois.


Aujourd'hui, tout comme Öta, ils devaient être adultes. Il aurait apprécié de les revoir, mais ces derniers ne pouvaient plus faire le voyage. Ils avaient des responsabilités maintenant qu'ils dirigeaient la ferme de leurs parents.


Mais tant pis ! Öta avait hâte d'entendre toutes les histoires que son oncle allait lui raconter sur la vie dans l'Est. Il rêvait de s'y rendre un jour. Il souhaitait voir la ferme d’Üter, le village où son père avait grandi, les magnifiques forêts qui l'entouraient...



Öta avait longuement réfléchi à la manière d'aborder le sujet des feuilles et de la magie auprès de son oncle. Ce dernier allait évidemment remarquer le physique d’Öta, mais il s'imaginait devoir lui tirer les vers du nez, insister longtemps.


Ce fut pour cela que quand Üter fit le premier pas, alors qu'ils avaient à peine quitté le port, Öta n'en revint pas. Il tenta immédiatement de poser des questions, mais Üter le coupa et répondit :


« Plus tard. Laisse-moi retrouver mon petit frère, je te dirais tout ce que je sais lorsque nous serons posés. »



Ce furent des retrouvailles joyeuses qui réunirent les deux frères. Ëten et Üter ne s'étaient plus vus depuis des années, chacun s'occupant de sa famille. La terre et la mer les séparaient, mais leurs cœurs étaient restés liés.


C'est un grand festin qu'ils partagèrent ce soir-là. L'alcool, les souvenirs de jeunesse et les éclats de rire coulèrent à flots. Öta n'avait pas vu son père aussi heureux depuis des années.



Maintenant qu’Üter était installé, il était temps d'aborder tous les non-dits autour de la magie. Öta devait en apprendre plus sur ce qu'il lui arrivait et sur les secrets de sa famille.


S'il avait accepté de laisser un peu de temps à son oncle, il ne sentait pas moins pressé par le temps. Il n'avait aucune envie de se recouvrir entièrement de feuilles. Il aimait la nature, mais pas au point de vouloir de ne faire littéralement qu'un avec elle.


Ils se donnèrent rendez-vous un soir, une fois Ëten endormi, pour aborder sérieusement le sujet.



« Que se passe-t-il à la fin ? » murmura Öta. « Pourquoi mon père fait comme si de rien n'était ? Je vois bien que depuis que je suis rentré, il évite de me regarder et de me parler. Il y a de la peur dans son regard. »


Ils s'étaient installés dans une pièce poussiéreuse qu’Öta connaissait bien. C'est ici qu'il avait étudié durant toute son enfance. À cet endroit, ils ne seraient pas dérangés. Üter commença son explication :


« Comme tu dois t'en douter, c'est un mal qui se transmet dans notre famille depuis des générations. »



Depuis toujours, elle était touchée par une étrange maladie héréditaire. Était-ce une bénédiction ou une malédiction ? Personne ne le savait. Beaucoup pensaient que leur famille avait été bénie par des esprits ou qu’elle en descendait. Dans les villages alentour, c’est cette légende qui tournait.


Mais au sein même de la famille, certains parlaient au contraire... de vengeance.


Ils racontaient que les esprits s’étaient vengés d’un de leurs ancêtres en leur jetant ce sort, maudissant la magie de ses descendants à jamais. Où était la réalité ? Le mensonge ? Peut-être que tous se trompaient.


Chaque personne de leur sang était concernée, mais le mal ne se manifestait qu’auprès de ceux qui s’approchaient trop de la magie. Comme si celle-ci réveillait le mal endormi. Ces personnes développaient alors d’étranges feuilles qui poussaient sur leur corps.


Des plantes aux vertus particulières.


« Ma mère utilisait son don sans crainte. Les feuilles poussaient sur ses bras, comme toi. Elles ressemblaient à celles d’un chêne, mais n’en étaient pas.

– Et quel était leur effet ?

– Ça peut sembler idiot, mais mélangées à la terre elles avaient d’incroyables vertus. Elles fonctionnaient comme un engrais, un fertilisant très puissant. Nous nous en servions pour que nos champs soient toujours abondants. »


L’étrange magie provenant de ces plantes avait sauvé plusieurs fois le village de la faim. À sa mort, leur mère avait laissé derrière elle un pot contenant des feuilles séchées. Elle les avait mises de côté durant des années, pour qu’ils puissent s’en servir et aider leur ferme si un jour un drame devait arriver à leurs cultures.



Öta buvait les paroles de son oncle. Il aurait aimé rencontrer sa grand-mère, apprendre à maitriser la magie à ses côtés et découvrir la vie qu’elle menait. Mais est-ce que ses feuilles avaient le même pouvoir ? Avant même qu’il ne pose la question, Üter comprit et répondit :


« Non. Chaque personne développe un don différent. Tu dois savoir que nous avions un frère autrefois, dont tu partages le nom.

– Öta, le jumeau de mon père. J’aurais tant voulu le connaitre... »


Les jumeaux avaient tous deux appris la magie. Ils espéraient ainsi pouvoir aider leur famille à leur tour, à l’instar de leur mère. Mais rien ne se passa comme prévu. Les feuilles des frères n’étaient pas comme ils les avaient imaginées. Elles étaient dangereuses. Porteuses de morts, aussi puissantes et violentes que le plus morbide des poisons.


Ils décidèrent de ne jamais s’en servir. À leurs yeux ce n’était pas une bénédiction, mais bel et bien une malédiction ! La fiancée d’Ëten, qui en était décédée, en était la preuve. Ëten ne se remit jamais de cette tragédie.


Ni de celles qui suivirent.



Cesser d’utiliser la magie assez longtemps permettait d’arrêter la pousse des feuilles. Il suffisait ensuite de les couper proprement pour qu’elles ne reviennent pas. Elles laissaient quelques croûtes sur la peau, mais guère de traces indélébiles. Le temps effaçait les cicatrices.


Néanmoins, il fallait alors faire une croix définitive sur la magie, car au moindre contact avec elle, les feuilles revenaient aussitôt.


« C’est ce que fit mon père ?

– Non, contrairement à Öta il n’y parvint pas. »


Ëten adorait la magie. Elle le passionnait, le fascinait. Il vivait pour elle et était toujours à la recherche de moyens d’en savoir plus, encore et encore. Ces feuilles qu’il haïssait, il les cachait sous des vêtements. Celles qui étaient trop visibles, il les arrachait.


Avec le temps, il comprit comment ralentir leur progression. Et il n’en resta pas là. Il s’abreuvait de décoctions, ne couvrait de crèmes, pour trouver un remède à ce mal qui l’affligeait. Tout était bon pour continuer d’user de la magie.



Le Royaume du Nord avait pris le Pays de l’Est sous son aile. Depuis, de nombreux échanges culturels et politiques avaient lieu entre eux. L’Est, qui était un pays à faible puissance militaire, mais aux nombreuses ressources, envoyait des émissaires dans le Nord en échange de sa protection.


Ces émissaires étaient de bons mages, qui partageaient leur savoir et leur culture avec les érudits du Nord. Ils se rendaient dans la région du Royaume où la Magie était étudiée : les Terres orageuses.


C’était un honneur que beaucoup d’habitants de l’Est rêvaient d’avoir. Le Royaume du Nord était vu comme un sauveur, qui les protégeait de la guerre.


À force d’étudier et de travailler dur, Ëten se fit remarquer. Et quand il fut choisi pour devenir le nouvel émissaire, il ne put refuser. Il pouvait gagner beaucoup d’argent grâce à ce titre et de ce fait aider les siens. Sa famille ne serait plus jamais dans le besoin. Et, ce n’était pas comme s’il avait le choix... s’il refusait, c’est le déshonneur qu’il allait leur apporter.


C’est donc accompagné de son frère, car les jumeaux refusaient de se séparer, qu’il s’installa dans le Nord.


Évidemment, malgré ses tentatives pour les dissimuler, les érudits découvrirent l’existence de ces feuilles. Elles furent étudiées avec soin. Un poison aussi foudroyant que personne ne connaissait... c’était une arme de grande valeur ! Ils remarquèrent aussi qu’ils pouvaient en extraire un autre poison qui ne réagissait qu’à la magie, peu importe sa forme.


Un poison qui deviendrait très utile, car après tout, le but de leurs recherches était d’apprendre un maximum sur la magie... pour mieux la bannir.



Öta participa lui aussi aux expériences. Jusque là, Ëten s’était bien gardé de parler de lui, le protégeant comme il pouvait de ses mauvais choix. Mais lorsque les érudits avaient appris son existence et surtout sa présence dans le pays, ils n’avaient pas hésité une seconde.


Ëten et Öta n’étaient pas des Humains après tout, ils étaient des Etris. Ne disait-on pas de cette race qu'elle était plus proche des animaux que des hommes ?


Les érudits n’avaient aucune honte à exploiter les deux frères. Ils n’étaient que des bêtes, des créatures étranges à leurs yeux. Des créatures qui leur rapporteraient beaucoup. Peu importe si ça signifiait de les "endommager un peu".


Öta et Ëten étaient coincés dans un pays qu’ils ne connaissaient pas, exploités par des hommes au service du roi. Ils n’avaient aucun moyen de s’en aller. Aucun moyen de se révolter.


Cette histoire d’émissaire, de partage, de savoir, d’honneur pour son pays... ce n’était que du flan ! Le Nord prenait ce qu’il voulait, peu lui importait le reste.


Certes, il y gagnait richesse et titres, mais à quel prix ?


Ëten s’en rendait maintenant compte. Si seulement il avait arrêté la magie lorsqu’il en était encore temps... Produire ces feuilles sachant qu’elles seraient utilisées contre des personnes le dégoutait.


Il avait honte de son corps, honte d’avoir entrainé son frère là-dedans.



Et un jour, le destin continua de s’acharner sur eux.

Ils tombèrent malades.


Ils ne parvenaient plus à utiliser la magie. Les feuilles ne poussaient plus. À chaque nouvelle tentative, ils s’affaiblissaient encore plus. Le poison se retournait contre eux.


L’expérience s’arrêta à la mort d’Öta.



Ëten avait survécu, mais de justesse. Avec le temps, il avait acquis une plus grande résistance au poison des feuilles, à l’inverse d’Öta qui avait abandonné la magie durant des années.

C’est ce qui le sauva.


Il s’en remit lentement, mais savait désormais que la moindre utilisation de la magie provoquerait sa mort. La maladie n’était jamais vraiment partie... elle lui laissait juste un sursis. Les symptômes reviendraient à la moindre erreur.


Les recherches sur lui furent arrêtées. Avec le temps, les érudits avaient acquis le savoir nécessaire pour reproduire le poison et n'avaient plus besoin d'un homme inutile. Mais ils gardèrent le corps d’Öta. Ils voulaient le disséquer. L’examiner en détail.


Ëten annonça la mort de son frère à sa famille dans une lettre. Il n’expliqua pas ce qu’il s’était passé. Il n’évoqua jamais sa détresse et sa honte. Sa lettre était courte, vague, vide.

Puis, il coupa les ponts.



Sa famille se trouvait dans un autre pays. Ils n’étaient pas aisés. Ils n’avaient pas les moyens de traverser la mer pour le rejoindre. Ils n’avaient pas les moyens de lui envoyer un message.

Rester sans nouvelles de lui était un supplice. Ils s’inquiétaient terriblement.


Comment Ëten pourrait-il survivre sans son jumeau, son âme sœur ?

Que s’était-il passé exactement ?


Mais au bout de quelques années, Ëten refit surface. Il n’était plus le même, mais il avait décidé de renouer les liens avec sa famille. D’aller de l’avant. Parce que maintenant, quelque chose comptait pour lui.


Son fils, Öta.



Partie 3 - Que faire ?


Üter soupira.


« Quand j’ai appris la vérité, je n’en revenais pas. Je voulais qu’il rentre, qu’il t’emmène avec lui et qu’on oublie tout ça. Mais il ne pouvait pas. Il ne voulait pas. Je n’ai jamais compris ses raisons, mais je sais une chose : depuis ce jour, il craint la magie. Elle le dégoute. Et c’est pour cette raison qu’il ne t’en a jamais parlé. Il ne souhaitait pas que tu empruntes sa voie, que tu reproduises ses erreurs. Il pensait qu’en te gardant dans l’ignorance, tu serais à l’abri.

Mais c’était faux. Je lui ai toujours répété. Tu as la magie dans le sang, tu n’es pas son fils pour rien. »


Avec toutes ces révélations, Öta comprit qu’Élan et lui avaient fait fausse route. Ils s’étaient crus en sécurité, pensant que personne dans le Royaume n’avait connaissance de ce qui arrivait à Öta. Que personne ne pouvait faire le rapprochement entre ces feuilles et la magie.

Mais c’était faux.


Et si sa famille était toujours surveillée ?


Beaucoup de choses avaient dû changer entre temps, il s’était passé plus de vingt ans. Les érudits étaient déjà âgés à l’époque. Aujourd’hui, ils étaient peut-être morts. Peut-être. Il n’y avait aucune certitude.


Öta ne pouvait plus sortir avec les feuilles visibles.

C’était beaucoup trop dangereux.



Ils décidèrent donc de couper les feuilles d’Öta. Üter savait comment faire et allait lui montrer. La discussion porta ensuite tout naturellement sur leur effet. Pour l’instant, elles n’avaient rien montré de particulier, ce qui était déjà un bon signe.


Mais ils ne pouvaient pas rester dans l’ignorance éternellement. Öta voulait continuer à utiliser la magie, mais ne le souhaitait qu’à condition de ne pas risquer la santé d’autrui avec. Il fallait qu’il trouve la vertu de ses feuilles pour prendre sa décision.


Üter évoqua un livre, que leur famille se transmettait depuis très longtemps. Dedans étaient consignées les vertus des feuilles de chaque membre de la famille en ayant développé, ainsi que des recherches et des conseils sur la manière d’apprendre à connaitre les siennes.



Üter n’avait jamais lu ce livre, n’ayant jamais eu aucun attrait pour la magie. Et Ëten n’accepterait jamais d’aider son fils sur cette voie. Ils décidèrent donc qu’Üter retournerait dans l’Est prochainement pour chercher le livre. Ou plus exactement, le copier. Ça prendrait du temps, mais il n’était pas question de retirer cette source aux autres descendants de la famille.


C’était un voyage long, mais important pour le futur d’Öta. Et ce voyage serait le dernier d'Üter. Ils avaient convenu qu'il viendrait s’installer définitivement dans le Nord, pour passer un maximum de temps avec son frère. Pour vivre leurs dernières années ensemble.


Les enfants d’Üter étaient adultes, mariés et géraient la ferme familiale depuis des années. Ils n’avaient pas besoin de lui, contrairement à Ëten.


Après tout, on ne savait pas combien de temps il lui restait à vivre... les séquelles de sa pendaison étaient lourdes, il était très affaibli que ce soit physiquement ou mentalement.

Üter était volontaire pour l’aider à gérer son domaine, en attendant le jour où Öta souhaiterait pleinement en hériter.


Si ce jour arrivait, car aujourd’hui, ce n’était pas le cas. Öta ne voulait pas d’une vie de noble, il ne voulait pas de ça. Et quand il voyait ce que son père était devenu, son dégoût pour cette vie ne faisait que s’accroître.


Mais il n’était pas non plus irresponsable. En attendant que son oncle revienne, il allait continuer à s'occuper du domaine à la place de son père. Peu importe le temps que ça prendrait.



Le lendemain, lorsqu’Öta retrouva Élan, il lui raconta tout ce qu’il avait appris sur les feuilles et ses projets pour la suite. Il n’aborda que brièvement le passé de son père, sans entrer dans les détails ; seulement les informations qui leur seraient utiles pour leurs recherches.


« Je reste avec toi. J'ai hâte de lire ce grimoire que ton oncle va ramener. » fit Élan.

Öta était son apprenti. Peu importe l’endroit où il se trouvait, il comptait bien continuer à lui apprendre son métier. De plus, toute cette histoire le fascinait. Il souhaitait soutenir Öta et il savait que sa présence l’aidait moralement. Le jeune homme se sentirait moins seul et livré à son sort si un proche restait à ses côtés.


Parce que oui, même s'il n'allait pas le crier sur tous les toits, Élan s’était pris d’affection pour Öta et ne voulait plus s'en séparer.



Et ce fut ainsi qu'Üter repartit pour le pays de l’Est, porteur des espoirs d’Öta.





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